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Stéphane Roy « La viticulture doit cesser de regarder le passé »

Publié le vendredi 27 juin 2014 - 10h19

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Le 24 juin, Stéphane Roy a été élu à la présidence de l'UGVC, l'Union générale des viticulteurs pour la défense de l'AOC Cognac. Ce viticulteur succède à Christophe Forget. Il milite pour des rapports constructifs avec le négoce et pour une croissance raisonnable du vignoble.

Christophe Forget (debout) et Stéphane Roy, l'ancien et le nouveau président de l'Union générale des viticulteurs pour la défence de l'AOC Cognac (UGVC)  ©Olivier Sarazin/Sud-Ouest

Christophe Forget (debout) et Stéphane Roy, l'ancien et le nouveau président de l'Union générale des viticulteurs pour la défence de l'AOC Cognac (UGVC) ©Olivier Sarazin/Sud-Ouest

Quels sont les principaux enjeux pour la viticulture cognaçaise ?

Stéphane Roy : Le premier défi est celui de la productivité. Notre vignoble est vieillissant, il faut le renouveler. La viticulture a déjà fait de gros efforts depuis deux ans et nous devons encore attendre trois ou quatre ans avant d’en voir les résultats. Mais nous devons poursuivre l’effort. Le second défi est celui de l’agrandissement du vignoble. Nous avons un objectif de production de 11,66 hl d’alcool pur par hectare. Mais, même s’il est atteint, la production du vignoble restera un peu faible. C’est pourquoi il est nécessaire de l’agrandir à partir de 2016 ou 2017. A priori, il s’agira de planter 8 000 ha en sept ans.

Cette extension du vignoble ne fait pas l’unanimité. Des viticulteurs la redoutent. Comment allez-vous les convaincre ?

S. R. : Nous avons tous des craintes, moi y compris. Elles sont légitimes. Mais nous allons planter seulement 8 000 ha, et pas 50 000 ha comme dans les années 1970. De plus, cela ne va pas se faire en un coup, mais sur plusieurs années, avec des indicateurs de pilotage pour ajuster les surfaces aux besoins. Nous ne devons pas oublier que les maisons de négoce font partie de grands groupes multinationaux, où les marques de cognac côtoient celles de whisky et de vodka. Les producteurs de cognac doivent convaincre ces groupes de continuer à investir ici. Pour cela, il nous faut très clairement apporter des garanties sur leur approvisionnement et les soutenir dans leur stratégie. Nous devons nous développer, mais de manière raisonnable et maîtrisée.

Sur quoi portent les indicateurs de pilotage ?

S. R. : Nous serons attentifs aux prix, aux niveaux de production réels de la viticulture… Nous avons aussi besoin d’une vision à long terme. Il nous faudra éviter de réagir dans l’immédiateté.

Quels sont les atouts et les handicaps de la viticulture charentaise ?

S. R. : Elle représente l’un des plus grands vignobles de vin blanc au monde. Elle maîtrise sa production. Elle est capable de produire 120 à 130 hl/ha de manière régulière. Elle produit les meilleures eaux-de-vie du monde. Pourtant, elle manque de confiance en elle et en son avenir. Elle a tendance à regarder le passé et surtout les mauvais souvenirs. Certes, il ne faut pas oublier ce qui s’est passé dans les années 1990. Mais nous ne pouvons pas refuser de progresser à cause de la crainte de répéter ces erreurs anciennes.

Où en sont les relations entre la viticulture et le négoce ?

S. R. : Nous avons des discussions apaisées. La logique d’opposition entre les deux familles ne permet pas à la filière de bien fonctionner. Le négoce a consenti de gros efforts ces dernières années et a augmenté ses prix d’achat. Depuis quelques années s’est développée une logique de partenariat viticulture-négoce. Le marché est porteur. Le négoce annonce des perspectives, nous lui faisons confiance. Le rendement autorisé pour le cognac a été décidé pour répondre à la demande du négoce. En contrepartie, le négoce redonne à la viticulture une partie de la marge qu’il dégage. La confiance est réciproque. C’est parce que le négoce sait que la viticulture va répondre à ses besoins qu’il peut chercher de nouveaux marchés. Si une des deux familles essaie de tirer la couverture à elle, tout le monde est perdant. C’est ce qui s’est passé dans les années 1990 (le négoce avait alors dénoncé les contrats qui le liaient à leurs livreurs, NDLR). La viticulture a alors cessé de renouveler son vignoble. De la même façon, si la viticulture diminue sa production pour faire monter les prix, elle provoquera l’appauvrissement de toute la filière au bout du compte. Je regrette que le dialogue ne soit pas aussi paisible au niveau national entre les deux familles où chacune essaie de faire plier l’autre. À court terme, ça peut passer. Mais à long terme, les deux familles y sont perdantes.

Myriam Guilllemaud

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