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Les réserves de la vigne

La vigne - n°103 - octobre 1999 - page 0

Les réserves sont indispensables pour le redémarrage de la végétation au printemps. Des études en cours apportent de nouvelles informations sur leur gestion.

Pour assurer son redémarrage au printemps, la vigne puise dans les réserves constituées l'année précédente. Du point de vue des ressources carbonées, la vigne utilise l'amidon stocké dans les organes vivaces. Puis la photosynthèse devient active ; les feuilles, alors matures, prennent le relais et assurent l'approvisionnement de la plante en sucres. Le phénomène de mise en réserve des glucides est connu et décrit par François Champagnol, dans son ouvrage de référence sur la physiologie de la vigne (1984). Les sucres produits par la photosynthèse sont répartis selon un ordre de priorité. En premier lieu, ils sont consommés sur place pour la respiration et, éventuellement, la croissance de la feuille. Ensuite, au cours de la période de croissance du végétal, ils sont orientés vers l'extrémité des rameaux et les grappes. Pendant la maturation, à condition que la croissance soit interrompue, les glucides sont consommés sur place, puis orientés vers les baies (stockage sous forme soluble) et vers les parties vivaces (stockage sous forme insoluble, l'amidon). Si la vigne est vigoureuse et la croissance maintenue, l'extrémité des rameaux continue de constituer un centre d'appel au détriment des baies et des parties vivaces.Il existe donc une 'compétition' entre ces différentes 'filières'. On comprend qu'une vigne chargée ou vigoureuse ait plus de difficultés à constituer des réserves. Une fois la récolte passée, les sucres encore synthétisés sont consommés sur place mais surtout stockés, d'où l'intérêt de maintenir un feuillage actif tard en saison.Pour l'azote, la vigne utilise aussi au printemps les réserves constituées l'année précédente. La mobilisation a lieu jusqu'à ce que le système racinaire devienne actif et puise dans le milieu l'azote nécessaire à la plante. La constitution des réserves carbonées et azotées au cours de la saison, puis leur mobilisation au printemps suivant, influencent donc la reprise de la végétation, et notamment la sortie et le développement des grappes.La société champenoise Mumm-Perrier-Jouët et l'université de Reims, du réseau 'Vignes et vins septentrionaux', ont encadré un travail de doctorat avec pour objectif d'établir l'existence de liens entre les réserves de la vigne, le développement des inflorescences et la coulure. Deux variétés ont été choisies, l'une coularde, le merlot, l'autre non coularde, le pinot noir. Les deux cépages, greffés sur SO4, ont été cultivés pendant trois ans sous serre avec un apport régulier de solution nutritive de sorte que les plantes ne subissent aucune carence. Lors des deux premières années, la croissance est suivie en mesurant la production de matière sèche. Pendant la troisième année, des prélèvements sont effectués aux stades repos végétatif, première feuille étalée, première fleur et fin de nouaison.Au printemps, les réserves carbonées sont utilisées dès les pleurs. Concernant les réserves azotées, les chercheurs champenois observent une diminution de la quantité d'azote dans les parties pérennes entre les pleurs et la floraison. Jusqu'au stade première feuille, il s'agit essentiellement d'une perte liée à la dégénérescence des racines (comme pour l'amidon). Ensuite, l'azote est mobilisé pour alimenter les parties aériennes. Dans les deux cépages, l'absorption d'azote dans le milieu, très faible au moment de la reprise de végétation, commence après le stade première feuille et devient intense seulement à partir de la floraison. Pendant cette dernière période, le pinot noir possède une plus grande capacité d'absorption de l'azote que le merlot.L'équipe champenoise montre ainsi qu'après la floraison, la production de la photosynthèse est plus rapidement excédentaire et l'absorption d'azote plus intense chez le pinot, qui commence à reconstituer ses réserves, que chez le merlot qui demeure dépendant d'elles au moins jusqu'à la fin de la nouaison. Les chercheurs émettent l'hypothèse que cette efficacité plus précoce de l'assimilation chez le pinot pourrait expliquer sa moindre sensibilité à la coulure par rapport au merlot.D'autres expérimentations ont été menées sur le gewurztraminer, cépage coulard. Les résultats obtenus confirment la plupart des observations faites sur merlot. L'éventail des cépages étudiés a été plus récemment élargi au pinot meunier et au chardonnay afin de valider les résultats. Les observations faites permettent aussi de penser qu'un apport important de fertilisants azotés au printemps, alors que la vigne absorbe encore peu dans le milieu, sera peu efficace. En revanche, on peut imaginer de fractionner l'apport, d'une part à l'automne au moment de la mise en réserve, d'autre part au printemps. Concernant la gestion de l'azote, des travaux sont en cours au département d'agronomie de l'Inra de Bordeaux. Ils sont cette fois réalisés au champ avec un système de prélèvement par micro-carottage au niveau du cépage et du porte-greffe. Des mesures de croissance sont effectuées au printemps. L'objectif est ici de décrire les besoins en azote de la plante, d'étudier les ressources offertes par les différents terroirs et de faire le lien avec la qualité du raisin... Des questions demeurent également à propos des réserves : quand se constituent-elles? existe-t-il une compétition avec d'autres centres d'appel? quelle est l'importance de la survie du feuillage en fin de saison par rapport à la mise en réserve?...

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