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Mildiou : l'agressivité à fleur de pluies...

La vigne - n°86 - mars 1998 - page 0

Le mildiou nécessite que plusieurs conditions soient remplies pour s'installer sur la vigne. Cependant, lorsque la météo lui est favorable, la pression mildiou peut très vite évoluer d'une situation à risques faibles vers une situation à risques élevés.

Le mildiou a la faculté de changer de visage très rapidement. S'il semble peu agressif lorsque la vigne débourre, celle-ci n'est pas pour autant à l'abri. A l'inverse, une agressivité importante du champignon au sortir de l'hiver ne signifie pas forcément une évolution explosive de la maladie.Le bon positionnement du premier traitement conditionne assez souvent la réussite de la protection antimildiou. Il permet d'éviter la formation d'un pied de cuve. Cette intervention se décide en fonction de la date probable de sortie des premières taches de mildiou et de son agressivité en début de campagne. Dans les vignobles septentrionaux, elle est généralement conseillée juste avant l'apparition des premières taches pour éviter les repiquages, sauf si le risque est jugé faible; on attend alors la sortie des premières taches, voire celles de deuxième génération pour intervenir. A l'inverse, dans les vignobles méridionaux, le plus souvent, on attend la sortie des foyers primaires pour traiter, sauf si les risques sont jugés élevés lors des contaminations primaires.Il faut donc estimer à la fois la date de sortie des taches et l'agressivité du champignon. Pour la première, on tient compte de plusieurs paramètres. Tout d'abord, la vigne ne devient réceptive que lorsqu'elle a des organes herbacés, à l'éclatement des bourgeons ou dès la première feuille étalée. De plus, il faut que les oeufs d'hiver du mildiou soient ' mûrs '. Enfin, une pluie contaminatrice, alliée à une température suffisante (supérieure à 11°C), est nécessaire. Il ne sert donc à rien de craindre le mildiou début mars parce que l'hiver a été favorable à la maturation de ses oeufs. Les conditions climatiques du printemps jouent également un rôle.Connaissant la date des pluies contaminatrices et la durée d'incubation, fonction de la température, on peut alors prévoir la date probable de sortie des taches. Le modèle Milvit sert aussi pour cette détermination. Cependant, l'intensité de ces sorties reste alors inconnue. Le modèle Epi et l'appréciation de la faculté germinative des oeufs d'hiver complètent ces informations en évaluant l'agressivité du champignon.Avec ces cartes en main, la date de première intervention peut être fixée. Cependant, ce n'est pas toujours facile. Claude Magnien, de la Protection des végétaux de Beaune, explique qu'en 1996, l'Epi est resté faible en mars et en avril puis il a peu progressé la première quinzaine de mai. Les pluies de la mi-mai auraient dû être faiblement contaminatrices, d'après l'Epi. Si seule cette information avait été prise en compte, les Avertissements auraient conseillé de retarder la première intervention après la sortie des taches.Cependant, les oeufs d'hiver montraient une faculté germinative assez élevée et vu l'importance des précipitations, la Protection des végétaux a recommandé de traiter au plus tard à la date de sortie des foyers primaires. Heureusement car les conditions climatiques sont ensuite devenues très favorables au mildiou et ont entraîné des repiquages sévères. ' Le modèle Epi avait cette année-là, pour la première fois, sous-estimé le risque, explique Claude Magnien. Ces résultats rappellent, si besoin est, qu'un modèle de prévision aussi performant soit-il, n'est pas à l'abri d'une dérive. Les résultats des simulations doivent être analysés et, si possible, confrontés aux données obtenues par d'autres moyens d'investigation. 'L'an dernier, en mars et en avril, l'Epi comme la faculté germinative laissaient apparaître des risques faibles. Les premières contaminations début mai furent d'intensité assez réduite mais ensuite, jusqu'à mi-juillet, les conditions ont été particulièrement favorables au champignon. ' Entre le 18 mai et le 10 juin, deux générations de mildiou ont pu se succéder, explique Claude Magnien. On est alors passé en moins d'un mois d'une situation à risques faibles à une situation à risques forts. ' Puis douceur et humidité ont engendré une pression très élevée de mildiou avec une explosion de la maladie dans l'Yonne et la Champagne. Des conditions si favorables au champignon nécessitaient une protection sans faille, ce qui n'était pas toujours facile à réaliser avec des pluies quasi quotidiennes à certaines périodes. Les échecs de protection ne sont pas à mettre sur le compte d'une première intervention trop tardive, comme certains ont pu le croire. Les conditions hivernales et printanières jouent un rôle sur l'expression de la maladie en début de campagne, celles de mai et juin conditionnent l'évolution de la maladie. Même si l'inoculum semble faible au départ, il est toujours suffisant. Dans des conditions favorables au champignon, l'évolution de la maladie peut aller très vite. Ce fut le cas en 1993 en Aquitaine : au sortir de l'hiver, le risque était jugé faible à moyen et les foyers primaires sont apparus avec une importance généralement modérée à la mi-mai. Puis la maladie a véritablement explosé en juin et juillet lors des troisième et quatrième cycles de repiquage. Sur un site étudié par la Protection des végétaux, qualifié de sensible, les symptômes ont été multipliés par 10 000 en moins de quinze jours après deux cycles de repiquage! Dans des conditions très favorables au champignon, à chaque génération, les symptômes peuvent être multipliés par 300 et l'on peut avoir un cycle complet, de la contamination à la sporulation, en une semaine!

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