Questions juridiques

Questions diverses

Question - Pendant près de dix ans, notre frère a vécu au crochet de nos parents, et ce en totale dépendance, sans payer ni logement, ni nourriture, ni aucune charge (eau, électricité…). A la suite du décès de notre dernier parent, pouvons-nous demander une indemnité compensatrice ?

Réponse -

Est-ce que les parents ont voulu avantager leur enfant ou est-ce plutôt un état de fait ? C'est la véritable question à se poser ici.

Dans un cas, l'intention libérale est considérée comme un cadeau susceptible d'être rendu au moment de la succession (donation rapportable), dans l'autre non.

Il faut distinguer deux hypothèses.

• Lorsque l'enfant est hébergé gratuitement au domicile du parent, les deux vivants ensemble : « Dans ce cas, selon la jurisprudence, aucun rapport ne pourra être demandé lors du règlement de la succession, ni aucune indemnité compensatrice, dès lors qu'il n'est pas démontré que l'enfant a occupé une partie du logement qui aurait pu être donné en location à un tiers, explique Frédéric Moreau, notaire à Saint-Philbert-de-Grand-Lieu (Loire-Atlantique). Il s'agit du droit pour le parent d'user de son bien en toute liberté. »

• Lorsque l'enfant occupe un logement appartenant au parent, autre que le lieu de résidence du parent : selon la Cour de cassation (arrêt du 8 novembre 2005), l'avantage retiré par l'un des enfants de l'occupation gratuite et prolongée d'un bien appartenant à ses parents constitue un avantage indirect dont le bénéficiaire doit rendre compte à ses cohéritiers.

« Cela suppose toutefois que l'avantage ainsi procuré soit certain et réel, qu'il y ait un bénéfice pour l'héritier (une économie) », précise le notaire.

Cette jurisprudence a été confirmée par la réforme du droit de succession de 2006 qui prévoit à l'article 851 alinéa 2 du code civil que les donations de fruits ou de revenus sont rapportables, à moins que la libéralité n'ait été faite expressément hors part successorale.

Autrement dit, rien n'interdit aux parents d'avantager un enfant par rapport à ses frères et sœurs si c'est leur volonté, mais ils doivent l'indiquer clairement dans un testament.

Une jurisprudence récente (Cour de cassation du 18 janvier 2012) a apporté une précision quant à cette occupation gratuite. Pour pouvoir demander le rapport à la succession, il est impératif que soit établie l'intention libérale, c'est-à-dire la volonté du parent d'avantager son enfant par rapport aux autres, qui peut être déduite par l'appauvrissement du donateur.

« La preuve doit être apportée par celui qui prétend à l'existence d'une libéralité, par tous moyens. Ce sont les juges qui restent maîtres de son interprétation, cette notion d'intention libérale restant assez subjective », tient à signaler Frédéric Moreau.

Par contre, une fois les parents décédés, c'est le régime de l'indivision qui s'applique. En vertu de l'article 815-9 du code civil, « l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. »

En cas de litige, le tribunal de grande instance est compétent.

« Il est toujours préférable de se mettre d'accord au moment de la succession, car l'interprétation d'un juge reste imprévisible », conseille maître Moreau.

 

Mis à jour le 16 mars 2012

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