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IER FORUM DOUANE-VITICULTURE Opération séduction

BERTRAND COLLARD - La vigne - n°283 - février 2016 - page 8

Début février, la direction générale des douanes a organisé le premier forum douane-viticulture pour convaincre la filière qu'elle est à son service. Reste à faire avancer plusieurs dossiers. Chiche ?
EMMANUELLE GIDOIN, chef du pôle d'action économique de Champagne-Ardenne, explique la mission de son service sous l'oeil attentif de Thomas Montagne, président des VIF, et de Valérie Roos, responsable douane et fiscalité indirecte chez Rémy Cointreau.  © P. PONTIE/BIC DOUANE

EMMANUELLE GIDOIN, chef du pôle d'action économique de Champagne-Ardenne, explique la mission de son service sous l'oeil attentif de Thomas Montagne, président des VIF, et de Valérie Roos, responsable douane et fiscalité indirecte chez Rémy Cointreau. © P. PONTIE/BIC DOUANE

« Le soutien à la filière viticole est une priorité du gouvernement », a déclaré Christian Eckert, secrétaire d'État au Budget, lors de son discours d'ouverture du premier Forum douane-viticulture, à Paris, le 2 février. Tous les douaniers qui sont intervenus après lui se sont attachés à le démontrer. Voici comment.

Vitiplantation

« Il faut aller au bout »

Premier sujet abordé : Vitiplantation. Jérôme Despey, président du conseil des vins de FranceAgriMer, a salué « le travail remarquable » réalisé par les administrations pour mettre en place cette plateforme. « Vitiplantation est apprécié par les viticulteurs pour sa facilité d'utilisation. Il y a quelques bugs, mais cela va s'améliorer. Il faut aller au bout de la procédure. Si on veut simplifier, il est indispensable que l'on puisse faire les déclarations de plantation et d'arrachage en ligne sur Vitiplantation. »

« Nous sommes en retard sur cette partie-là du chantier, a convenu Hélène Brial-Robin, adjointe au chef du bureau viticulture de la DGDDI. C'est notre prochain objectif. »

CVI

Un dossier à déminer

Philippe Pellaton est intervenu après Jérôme Despey. Le secrétaire général de la Cnaoc et président du Syndicat général des vignerons des Côtes du Rhône, a demandé un meilleur accès aux données du CVI (casier viticole informatisé) pour les ODG et les organismes de contrôle. Pour deux raisons : mieux exécuter leurs missions de contrôle et mieux connaître leur appellation. « Vous avez une mine d'informations sur l'encépagement, l'âge des vignes, les surfaces plantées... que toutes les appellations n'ont pas, a-t-il dit aux Douanes. Or, ce qui nous intéresse au premier chef, c'est de connaître les surfaces plantées » afin que chaque appellation puisse calculer son potentiel de croissance.

Philippe Pellaton a également réclamé « qu'il n'y ait pas forcément de retour de bâton quand on relève une erreur dans le CVI ». À ses yeux, les Douanes doivent considérer positivement les demandes de rectification car le but « est de fiabiliser le CVI ». Elles doivent aussi mettre en place une procédure pour que les viticulteurs puissent transmettre « par voie dématérialisée » leurs modifications du CVI.

Philippe Pellaton a encore évoqué, très brièvement - l'heure était décidément à la concorde - les difficultés et contentieux liés à la mesure de la surface des parcelles. Il a incité les Douanes à harmoniser leurs procédures en la matière, tout en défendant un principe : « Que la surface au CVI soit la surface cadastrale ».

Corinne Cléostrate, sous-directrice aux droits indirects à la DGDDI, a convenu que les règles n'étaient « pas toujours les mêmes partout » au sein de son administration. Elle a annoncé la création d'un groupe de travail pour y remédier. S'agissant des données du CVI, Corinne Cléostrate a rappelé que les ODG ont déjà accès aux déclarations de stock et de récolte des opérateurs. « Pour l'accès aux surfaces, c'est sur notre feuille de route, a-t-elle promis. Nous avons pris du retard, mais nous ne l'avons pas perdu de vue. » Le sujet intéresse même les distilleries. Dans la salle, Claire Douence, vice-présidente de l'Union nationale des distilleries vinicoles, a plaidé pour « un système plus simple pour collecter les déclarations de récolte des viticulteurs ».

DRM

En route vers la télédéclaration

Après le CVI, il fut question de Ciel -abréviation de contribution indirecte en ligne. À l'avenir, tout le monde devra y passer sauf si on prouve qu'on se trouve dans une zone sans Internet. Entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019, le gouvernement rendra obligatoire la télédéclaration des DRM. La date précise du basculement doit encore être fixée.

Sur quelle plateforme les viticulteurs saisiront-ils leurs déclarations ? Sur celle de leur interprofession ou sur une nouvelle plateforme ad hoc des Douanes ? Les interprofessions militent pour la première formule, charge à elles de transmettre ensuite les sorties de chais aux Douanes.

Des essais sont en cours dans la vallée du Rhône. Brice Eymard, responsable du département économique d'Inter Rhône, les a présentés en laissant entendre que l'affaire était complexe. Il faut réaliser un portail unique pour la saisie de toutes les informations réclamées par les interprofessions et par les Douanes. Et il faut garantir la confidentialité quant aux données transmises. Sur ce point, Brice Eymard a souligné que « nous sommes soumis au secret professionnel ».

Cette précision n'a visiblement pas suffi à Boris Calmette. Par une simple question, en apparence anodine, le président des Vignerons coopérateurs de France est revenu sur le problème de la confidentialité. « Les opérateurs pourront-ils ou devront-ils remplir leur DRM sur la plateforme de leur interprofession ? » a-t-il demandé aux conférenciers. En d'autres termes : pourront-ils continuer de faire leur déclaration aux Douanes ?

« Il va falloir trancher, a répondu Corinne Cléostrate. C'est un vaste débat. Les interprofessions ont pour mission de réguler les marchés. Pour qu'elles puissent jouer ce rôle, il leur faut des données économiques. » Une manière d'indiquer vers où penche la balance ?

Obligation d'épalement

C'est terminé

La fin de l'obligation d'épalement (ou de jaugeage) des cuves pour les entreprises du négoce : elle a été annoncée par Hélène Croquevieille, directrice générale des Douanes, à l'ouverture du forum. « Nous sommes très heureux d'entendre que cette simplification sera mise en oeuvre, a déclaré Nicolas Ozanam, délégué général de l'UMVin, lorsque ce fut son tour d'intervenir. Pour une entreprise de 50 000 hl, les frais de jaugeage s'élèvent à 70 000 €. C'est un non-sens économique. Il existe d'autres moyens de sécuriser les échanges. »

Cette décision profitera également aux viticulteurs car ils pourront prendre plus facilement le statut de négociant. Reste qu'il ne s'agit pour l'instant que d'un accord de principe donné par l'administration. Un arrêté en Conseil d'État doit entériner l'affaire.

Déclaration des pertes

Une simplification

Les Douanes ont aussi accepté de simplifier le constat des pertes et manquants, toujours à la demande de la profession. La loi de finances rectificative pour 2015 a supprimé l'obligation de constater « physiquement » ces pertes lors de chaque opération. Une obligation qui était « extrêmement contraignante pour les opérateurs », a rappelé Nicolas Ozanam. Et, il faut le dire, rarement respectée dans les faits. Désormais, il suffit de « retracer dûment les pertes en comptabilité matière », stipule le code général des impôts. Reste à savoir comment. Il est question que les opérateurs n'aient rien à justifier tant que leurs pertes restent sous les seuils admis par l'administration. Un arrêté et une circulaire doivent encore préciser les choses.

Statut d'OEA

Pour être bien vu

Les Douanes se mettent aussi au service des exportateurs. C'est dans ce but qu'elles délivrent le certificat d'opérateur économique agréé (OEA), dont elles ont fait l'éloge. « C'est un label de qualité des processus douaniers d'une entreprise. Cela devient un passeport pour l'export », a assuré Hélène Croquevieille. « Ce statut est reconnu par les 28 États membres de l'Union européenne et par la Suisse, les USA, le Japon et la Chine. Il offre de nombreux avantages : dédouanement centralisé communautaire, réduction de garantie globale... », a ajouté Valérie Jimenez, du bureau de la politique de dédouanement.

Les Douanes avaient invité Valérie Roos, du groupe Rémy Cointreau, pour en parler. Mais elle les a contredites sur un point affirmant que « la reconnaissance réciproque, on n'en voit pas les fruits. Je suis très franche là-dessus ». En clair, les formalités à l'export n'ont pas été simplifiées pour Rémy Martin. Les douaniers de terrain ne seraient-ils pas bien informés des conventions que signent leur État ?

Malgré cela, Valérie Ross a reconnu que le jeu en valait la chandelle. « Nous avons amélioré notre organisation et nos procédures. » Les relations de Rémy Martin avec les Douanes se sont « fluidifiées ». Profitant d'avoir la parole, elle a réclamé la création d'un nouveau statut, celui d'OEA accises au travers duquel les Douanes certifieraient les procédures mises en oeuvre par les entreprises pour tenir leur comptabilité matière. C'est un vaste chantier auxquelles les Douanes n'ont pas dit non mais qui suppose l'aval d'une autre direction du ministère des Finances.

Vente à distance

« Nous sommes à votre écoute »

Dernier sujet abordé : la vente à distance dans l'Union européenne. Aujourd'hui, elle suppose d'avoir un représentant fiscal dans le pays de destination. Les Vignerons indépendants de France réclament depuis longtemps la suppression de cette obligation, comme l'a rappelé Thomas Montage, leur président. Là encore, les Douanes ont assuré être à l'écoute des besoins de la filière et vouloir simplifier les choses. Reste à savoir si cet état d'esprit persistera au-delà du forum et s'il sediffusera dans tout le corps douanier.

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