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éditorial

Prudence

Par Bertrand Collard, rédacteur en chef de La Vigne - La vigne - n°247 - novembre 2012 - page 5

Les temps changent. L'heure n'est plus aux coups de force ni aux rodomontades, mais à la négociation pour obtenir des hausses de prix. Avec la petite récolte, la production est pourtant en bonne position. En pareilles circonstances, il y a quelques années, des responsables syndicaux auraient tapé du poing sur la table. Avec leurs effets de manche, ils auraient ravi leurs troupes. Mais une fois les réunions syndicales passées, le soufflé serait retombé. Comme toujours.

Car on ne tord pas le bras aux acheteurs, ou alors une fois et, l'année suivante, ils vous rendent la pareille. Toute la filière semble avoir tiré cette leçon des années difficiles qui s'éloignent désormais. Que ce soit dans le Midi, où les revendications sur les prix sont apparues les premières, à Bordeaux ou dans les côtes du Rhône, partout la prudence est de mise. La production demande des hausses modérées de prix. Elle veut légitimement améliorer ses revenus et sa capacité d'investissement. Mais elle sait ce qu'il en coûte d'être trop gourmande : les consommateurs s'enfuient. Augmenter ses prix sans perdre ses marchés : l'équation est plus facile à poser qu'à résoudre, mais on a plus de chances de la résoudre à deux que seul.

C'est le pari que fait le Muscadet. Après avoir énormément souffert de l'instabilité de ses cours et de l'absence de coordination entre production et négoce, la région change de cap. Elle s'engage dans la contractualisation pluriannuelle. Bien des vignerons viennent de signer des contrats de trois ans avec leurs acheteurs où ils ont fixé la moitié du prix à l'avance. L'horizon se dégage. Si chacun joue le jeu, la région montera en gamme car elle aura noué des liens constructifs entre ceux qui savent séduire les marchés et leurs partenaires qui savent soigner les vignes.

Ce changement d'état d'esprit n'est pas seulement perceptible chez les producteurs. Les négociants eux aussi comprennent qu'à trop tirer sur la corde, elle risque de rompre. Ils s'inquiètent de la baisse de la productivité du vignoble. À Cognac, la situation est telle après des années de disette que les rendements plafonnent. Le négoce relève ses prix au-delà des attentes de la viticulture pour qu'elle puisse à nouveau rajeunir ses plantations. À qui le tour ?

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