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éditorial

Vous avez dit naturel ?

Par Bertrand Collard, rédacteur en chef de La Vigne - La vigne - n°220 - mai 2010 - page 5

Le bio est paré de toutes les vertus. Sain, naturel, responsable… on en oublie de meilleures. Gouvernement, chambres d'agricultures, acheteurs, journalistes : tout le monde nous presse de nous convertir pour « sauver la planète », renouer avec le terroir ou pour profiter d'un créneau porteur. C'est tout juste si les critiques sont permises. Pourtant, tout ce beau monde devrait faire preuve de prudence, car le tableau est loin d'être idyllique.

Plusieurs études montrent que la viticulture bio ne préserve pas mieux l'environnement que la viticulture raisonnée. Or, c'est l'une de ses raisons d'être. Les bios ont été les premiers, et longtemps les seuls, à dire que l'homme devait céder à ses enfants une terre aussi fertile qu'il l'avait eue en héritage. C'est tout à leur honneur. Mais ils devraient s'interroger sur leurs méthodes comme les autres viticulteurs sont obligés de le faire. La viticulture bio utilise de bien plus grandes quantités de produits de protection que la viticulture raisonnée : 78 kg/ha/an de spécialité commerciale contre 22 kg, dans une comparaison faite en Bourgogne. Voilà qui amène à réfléchir ! On nous répond que ce sont des produits naturels : cuivre et soufre. Certes, mais est-il naturel que d'en appliquer sur les vignes ? Et la vie des sols n'est pas plus active dans les parcelles en bio que dans les autres. Pourquoi ? A cause des apports de cuivre et du passage répété des outils de travail du sol. Chaque coup de lame ou de dent détruit quantité de vers de terre. N'importe qui ayant déjà sarclé une parcelle le sait. Mais on refuse de le voir. Il faut le travail patient et minutieux de chercheurs pour le rappeler. Et ces mêmes outils détruisent bien plus de racines de vignes que les herbicides en intoxiquent. C'est l'une des raisons pour lesquelles les rendements sont plus bas en bio qu'en raisonné. Certaines des comparaisons en cours révèlent même que les parcelles en bio peuvent être plus atteintes de pourriture grise que les autres.

En même temps que « La Vigne » s'est intéressée à ces études, un rapport parlementaire est venu dire que les risques pour la santé liés à l'usage des phytos sont largement surestimés par le grand public. On peut répondre à cette inquiétude en se convertissant. Mais on peut également décider de défendre la viticulture raisonnée, car elle a fait ses preuves.

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