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archiveXML - 2003

Des limites au démembrement d'une propriété préemptée

La vigne - n°142 - avril 2003 - page 0

Lorsque la Safer veut rétrocéder une propriété viable en la démembrant, elle doit respecter une procédure de demande d'autorisation.

Il arrive qu'une Safer s'efforce d'acquérir un domaine pour en revendre les terres, afin d'augmenter la superficie de propriétés voisines trop petites. Dans ce cas, elle morcèle le domaine préempté. Après la mise en place des Safer, ce problème a été évoqué devant les tribunaux. Un domaine agricole, constituant une unité économique d'exploitation, peut-il être divisé entre divers rétrocessionnaires après avoir été préempté ? Dans la seconde moitié des années 70, la Cour de cassation a répondu par la négative (1-11-75, 27-01-76, 21-06-78).
Pour faire échec à cette jurisprudence, le pouvoir agricole a obtenu une modification de l'article L 143-1 du code rural. Mais la liberté de la Safer n'est pas totale : les commissaires du gouvernement doivent être consultés, avec avis de la Commission des structures, devenue la CDOA, chaque fois que la préemption envisagée risque d'entraîner la suppression ou le démembrement d'une exploitation viable.
L'article L 331-4-7° du code rural, en vigueur jusqu'à l'application de la loi du 9 juillet 1999, prévoyait que les cessions d'immeubles opérées par les Safer soient soumises à simple déclaration au préfet, sauf si elles supprimaient une propriété indépendante dont la superficie était égale ou supérieure à deux surfaces minimales d'installation (L 331-3 du code rural). Ce seuil pouvait être réduit à 1,5 SMI par le schéma départemental.

Lorsque les rétrocessions aboutissaient au démembrement d'une exploitation supérieure à 1,5-2 SMI, il fallait impérativement une autorisation du préfet.
La législation de 1999 a modifié le texte. Désormais, sont soumises à autorisation les opérations réalisées par la Safer, ayant pour conséquence la suppression d'une unité économique comprise entre un tiers et une unité de référence, selon les schémas départementaux (seuil fixé en application de l'article L 331-2-2°). Dans l'arrêt analysé ci-dessous, c'est le texte antérieur à 1999 qui s'applique.
Un candidat veut acquérir l'intégralité d'une exploitation viticole, bâtiments non compris, mise en vente par la Safer après acquisition amiable. Mais cette dernière opte pour la candidature de plusieurs exploitants, afin qu'ils puissent agrandir leur vignoble respectif grâce au démantèlement de la propriété. Le candidat évincé conteste les rétrocessions. Après une longue procédure, la cour d'appel, saisie par la Cour de cassation, constate que l'exploitation vendue comprend uniquement des parcelles de vignes et que sa superficie est supérieure à 1,5 SMI. Les juges concluent qu'une autorisation est nécessaire et, qu'à défaut, les rétrocessions à différents agriculteurs sont nulles.
Le 27 février 2002, la Cour de cassation confirme cette décision. Le candidat évincé de l'acquisition de la totalité de la propriété n'obtient pas pour autant la rétrocession à son profit. En effet, la Safer doit publier un nouvel appel de candidatures. Cette fois, seul un amateur de l'intégralité de l'exploitation peut être retenu. Alors, pourquoi pas une EARL constituée entre les personnes qui ont bénéficié des rétrocessions fragmentaires ?

L'arrêt du 27 février 2002 précise que les décisions de la Safer portant rétrocession doivent être attaquées dans les six mois de la publication en mairie, et non dans les six mois de l'acte de mutation authentifiant la rétrocession. De plus, s'agissant de la contestation d'un acte de la Safer, elle seule doit être assignée. Les bénéficiaires des rétrocessions n'ont pas à figurer à l'instance.
La nouvelle rédaction de l'article L 331-2 du code rural, par la loi du 9 juillet 1999, ne semble pas aller à l'encontre de cette jurisprudence. Ce texte dispose seulement que s'il y a rétrocession globale d'une propriété d'une superficie comprise entre un tiers et une unité de référence, il suffit d'en faire une déclaration au préfet. A moins que, comme le prescrit l'article L 331-2 du code rural, l'acquisition de la superficie totale n'aboutisse à un agrandissement supérieur à deux unités de référence, auquel cas une autorisation est nécessaire.

Référence : Cour de cassation du 27 février 2002, Safer Rhône-Alpes Witrant, arrêt 392 FS-D.

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