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Les bouchonniers traquent les TCA

La vigne - n°140 - février 2003 - page 0

Les bouchonniers se mobilisent pour convaincre les utilisateurs des atouts de leurs produits. Ils perfectionnent leurs procédés de fabrication.

La cible principale des bouchonniers, comme des embouteilleurs, est le TCA, molécule responsable de goûts de moisi. Elle peut contaminer les vins bien avant l'embouteillage. Il y a une dizaine d'années, l'accent avait été mis sur ce fait. Depuis, des précautions ont été prises. Elles se sont traduites par une forte réduction des accidents causés par les atmosphères polluées dans les chais. Reste les bouchons, sur lesquels se concentrent désormais les soupçons. De plus, on suspecte le liège de véhiculer d'autres molécules malodorantes. Aux bouchonniers de faire le ménage chez eux.
Pour cela, ils ont entrepris des démarches collectives (code des bonnes pratiques et certification Systecode...) et individuelles. La sélection des lièges a été améliorée, le processus de fabrication repensé, et le chlore abandonné. Mais ces mesures n'ont pas été suivies d'un effet marqué.
Chaque entreprise propose aujourd'hui une formule ' magique ' pour éradiquer les TCA : des micro-ondes de Delfin au CO 2 supercritique, de Sabaté Diosos. Les micro-ondes sont réputées détruire toutes traces de TCA et de micro-organismes de transformation de ses précurseurs. Quant au CO 2 supercritique, il est censé avoir les propriétés de circulation d'un gaz et d'entraînement d'un liquide, débarrassant le liège des molécules contaminantes. Il est en phase de test semi-industriel au Commissariat à l'énergie atomique ; il sera industrialisé d'ici à fin 2004.
' Cette multiplication de recettes individuelles prouve que tous ont pris conscience du problème , se réjouissait dernièrement Marc Sabaté, à la fin de son mandat de président de la Fédération française des syndicats du liège. L'amélioration individuelle participe à l'amélioration collective. ' Mais il n'existe pas d'essai indépendant validant ces techniques. En avril 2000, l'Awri publiait des résultats d'essai du procédé Delfin, qui ne mettaient pas en évidence de différences significatives entre les bouchons traités ou non. L'inventeur du procédé, tout en remettant ces données en cause, n'a pas renouvelé l'essai.
C'est ce manque de transparence que les professionnels du vin dénoncent. Derrière les effets d'annonce, pas de réel résultat. ' Au CIVC, nous avons mis en place des protocoles d'essais, mais ils ne se sont jamais concrétisés , précise Michel Valade. Cortex est le seul à avoir joué le jeu. ' Cela a permis de valider l'efficacité de cette rondelle de silicone, qui forme un joint empêchant le contact entre le vin et le liège. L'ICV a également évalué ce système pour les vins tranquilles.

Toutefois, ' il ne faut pas jeter la pierre aux bouchonniers, ajoute Michel Valade . De réels efforts ont été réalisés, même s'ils ne se sont pas manifestés significativement sur les résultats. ' Il admet d'ailleurs qu'il y a une certaine fatalité à la persistance d'un ' bruit de fond ' avec le liège, car une matière naturelle n'est pas homogène. Sur une même planche de liège, certaines zones sont contaminées et d'autres exemptes de TCA, sans que cela soit prévisible. En outre, il ne faut pas négliger les problèmes en cave, malgré les progrès faits en la matière, car ' la décontamination est très difficile ', selon Arnaud Immelé.
Au-delà des goûts de moisi, la filière du liège s'attache à souligner les atouts d'un produit qui a fait ses preuves depuis sept cents ans. Elle s'implique également dans des démarches démontrant leur aptitude au contact alimentaire. Le Syndicat des bouchonniers en Champagne et le CIVC se sont associés pour une évaluation systématique du caractère alimentaire des produits mis en oeuvre dans l'élaboration des bouchons.

Pour les vins tranquilles, une telle coopération entre bouchonniers et professionnels du vin n'existe pas encore, faute d'interlocuteur unique. En faisant la preuve de son aptitude au contact alimentaire, le liège précède ses concurrents. Forte de 90 % de parts de marché, la filière du liège ne s'inquiète d'ailleurs pas du développement des autres bouchages, qu'elle juge complémentaires.
Si le principal défaut du liège reste le goût de moisi, il est souvent imbattable sur les autres caractéristiques du bouchage, avec un bon compromis entre étanchéité et perméabilité à l'oxygène. Il permet donc une évolution du vin, mais avec une certaine hétérogénéité. De plus, selon Arnaud Immelé, les polyphénols du liège pourraient jouer un rôle dans la limitation des phénomènes d'oxydation.

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