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Mieux vaut planter dès qu'on y est autorisé

La vigne - n°140 - février 2003 - page 0

Lors d'un référé concernant une affaire de plantations sur un site Natura 2000, le juge a estimé que le démarrage des travaux avait mis fin à l'urgence de suspendre ou non l'arrêté autorisant la plantation.

La chronique juridique, parue en mars 2002, portait sur une ordonnance du président du Conseil d'Etat du 9 juillet 2001. Cette décision mettait en échec un arrêté ministériel accordant des droits de plantation de vignes en AOC, empêchant un vigneron de développer son exploitation au nom de la protection de l'environnement. Elle se fondait sur la directive communautaire du 21 mai 1992, dite Natura 2000. Le 20 juin 2002, la même juridiction rendait une ordonnance contraire.
Pour comprendre un tel revirement, il faut expliquer la loi du 30 juin 2000, surtout ce qu'elle a changé dans notre droit. Avant ce texte, même si une décision de l'administration était contestée devant la juridiction administrative, son exécution n'était pas suspendue, sauf à utiliser la procédure de sursis à exécution devant le tribunal administratif. Cette procédure était, le plus souvent, vouée à l'échec du fait de l'exigence de la preuve d'un préjudice irréparable. La loi du 30 juin 2000 a mis un terme à cette situation. Elle confère au président de la juridiction, saisie de la demande en annulation, le pouvoir de suspendre l'exécution de la décision attaquée. Il faut deux conditions : une urgence et un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (article L 521-1 du code de justice administrative).

Dans les contentieux de 2001 et 2002, les décisions attaquées sont de même nature : il s'agit d'un arrêté ministériel attribuant des droits de plantations exceptionnels en AOC, relevant, en cas de contestation, du Conseil d'Etat. Dans la première affaire, le requérant était l'Association pour la protection de la nature du Haut-Rhin et, dans la seconde, l'Association de sauvegarde de la faune sauvage. La motivation développée dans les deux requêtes faisait valoir que les parcelles concernées se trouvaient dans un site Natura 2000 et que les plantations projetées iraient à l'encontre des objectifs de cette directive.
Dans la première affaire, la condition d'urgence exigée par l'article L 521-1 se trouvait dans le fait que les travaux de terrassement préalables aux plantations auraient des conséquences irréversibles sur le site. Par ailleurs, il y avait un moyen sérieux d'annulation de l'arrêté ministériel dû à l'erreur d'appréciation du ministre, dans le fait d'avoir autorisé des plantations de vignes dans le site Natura 2000.
Dans la seconde affaire, face à la condition d'urgence exigée par le texte, le président va relever que les travaux de terrassement et de plantation ont déjà été entrepris sur plusieurs des parcelles en cause, annihilant ainsi les causes de l'urgence retenues par la décision de 2001. Pour ces parcelles, l'une des conditions de l'article L 521-1 n'était donc pas établie. Par ailleurs, pour l'ensemble des terres, le magistrat estime qu'il ne peut y avoir de doute sérieux sur la légalité de l'arrêté attaqué. Ce second point mérite une attention particulière.

L'association requérante avait fait valoir, comme dans la précédente instance, qu'il y avait une atteinte à la directive Natura 2000. Selon elle, il y avait une menace pour la survie du torcol fourmilier, cousin du pic-vert, nichant dans les troncs d'arbres. Le président répond qu'en l'état du dossier, il ne ressort pas ' eu égard tant aux caractéristiques des parcelles que des exigences de protection c...s du torcol fourmilier, cques l'application de l'arrêté litigieux risquerait d'entraîner des conséquences incompatibles avec les objectifs de la directive communautaire du 21 mai 1992 '.
Un magistrat fait obstacle à la plantation, l'estimant contraire à la directive Natura 2000, un autre a une vision inverse... Lequel a raison ? C'est le débat au fond devant le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, qui pourra le dire. De toute manière, dans de telles situations, il existe un moyen pour faire échec au référé en suspension : dès la parution de l'arrêté autorisant les plantations, terrasser, labourer, planter, et il n'y aura ensuite plus d'urgence pour invoquer l'article L 521-1 du code de justice administrative...

Référence : ordonnance du président du Conseil d'Etat du 20 juin 2002, Association de sauvegarde de la faune sauvage 247 053.

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