Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2000

Les amendements basiques

La vigne - n°114 - octobre 2000 - page 0

Les amendements minéraux basiques (calciques ou magnésiens) permettent de maintenir ou d'augmenter le pH des sols acides ou en voie d'acidification.

Certains sols sont naturellement acides du fait de la nature de la roche mère ; citons, par exemple, le granit. Par ailleurs, les sols ont une tendance générale à s'acidifier par le simple fait d'être cultivés. Seuls les sols très calcaires n'entrent pas dans ce processus. L'acidification du sol a plusieurs conséquences. Les cations fixés sur le complexe argilo-humique (1) sont peu à peu lessivés et la structure du sol se dégrade. Par ailleurs, la solubilité des éléments minéraux varie avec le pH. Ainsi, à pH acide, les éléments fertilisants sont bloqués tandis que d'autres, comme l'aluminium, se solubilisent, entraînant un risque de toxicité.Pour lutter contre cette tendance à l'acidification, des amendements minéraux basiques sont apportés régulièrement. La remontée du pH a longtemps été attribuée à l'action des ions calcium ou magnésium. On pensait qu'ils arrachaient les ions hydrogènes (H) fixés sur le complexe adsorbant et les neutralisaient. On parlait donc d'amendements calciques et magnésiens. Les récents travaux du groupe ' Chaulage ' du comité français d'étude et de développement de la fertilisation raisonnée (Comifer) montrent que les ions calcium et magnésium sont incapables de casser la liaison forte liant les H au complexe adsorbant. C'est en réalité l'anion - aussi appelé base - de l'amendement qui agit sur le pH, le cation (Ca 2+ ou Mg2+) ne faisant qu'accompagner. Le mode d'action de l'amendement est détaillé dans l'infographie ci-dessus. On parle désormais d'amendements minéraux basiques. La révision de la norme définissant ces amendements est en cours. Cependant, si le mécanisme est mieux connu, les produits utilisés ne changent pas. On distingue les produits crus des produits cuits. Dans la première catégorie se retrouvent les calcaires, les craies, les dolomies et les marnes contenant des carbonates de calcium et/ou de magnésium. La cuisson de calcaires et de dolomies donne des produits cuits : la chaux vive ou éteinte qui renferme le calcium et le magnésium sous forme d'oxydes. Il existe aussi dans le commerce des amendements mixtes, mélange de produits crus et cuits. Le choix du produit et la détermination de la dose s'appuient sur différents éléments analytiques, pratiques et économiques. Le préalable évident de tout apport est l'analyse de sol. Cela permet non seulement de calculer l'apport nécessaire, mais également de mesurer l'évolution des différents paramètres dans le temps. La mesure du pH donne une première indication, simple et facile à comprendre. Cependant, tous les techniciens insistent : cela ne suffit pas. En effet, le pH varie selon les saisons. Ainsi, pour comparer l'évolution du pH d'une parcelle, il est indispensable de réaliser les analyses à la même période de l'année. Par ailleurs, il n'existe pas de pH optimal convenant à tous les sols. ' Le pH 7 n'est pas un objectif universel, précise un technicien. Il faut considérer la dynamique du sol, le type de roche mère, le niveau des argiles... Pour plus de fiabilité, nous utilisons d'ailleurs la mesure du taux de saturation en calcium et magnésium, c'est-à-dire la proportion de ces deux éléments sur le complexe argilo-humique. ' Le produit est choisi en fonction de différents critères. Si le sol est riche en magnésie, on préfèrera bien sûr un apport de calcaire qui ne contient pas de magnésium. Si, au contraire, le sol est pauvre en magnésie, on choisit un produit contenant du calcium et du magnésium. Dans le Muscadet, par exemple, sur des sols granitiques pauvres en magnésium, des apports de chaux magnésienne sont faits régulièrement. Selon la formulation des produits, la proportion de magnésie est plus ou moins importante. Par ailleurs, en fonction de l'urgence de la situation, on choisit un produit à action lente ou rapide. Les chaux (produits cuits) agissent plus rapidement sur le pH car elles sont plus solubles que les carbonates (produits crus). Ainsi, si le sol est très acide et qu'une intervention rapide est nécessaire, on privilègiera la chaux. Parmi les carbonates, la granulométrie et la solubilité carbonique des produits influent sur leur rapidité d'action. Le choix du produit dépend aussi de la nature du sol. ' Dans un sol riche en matières organiques, avec une bonne capacité d'échange cationique, on peut utiliser de la chaux vive à fort pouvoir arrachant. En revanche, si le sol est pauvre en matières organiques, on évite la chaux qui les minéralise ', indique Jean-Pierre Dionot, président du Comité d'étude et de liaison des amendements basiques (Célac). Enfin, le choix du produit dépend de sa facilité de mise en oeuvre et de son coût. La quantité d'unités neutralisantes à apporter est déterminée par les analyses et dépend des objectifs poursuivis. Selon la valeur neutralisante du produit choisi, on calcule la dose à apporter. Sur une vigne en place, il n'est pas question de faire des apports massifs car cela risque de perturber le sol avec une neutralisation excessive en surface. Les pertes d'amendement par ruissellement sont aussi plus importantes. Enfin, une remontée brutale du pH peut perturber l'activité microbienne. Les apports sont donc fractionnés sur plusieurs années. Sur un sol nu avant plantation, des quantités plus conséquentes peuvent être apportées. On prend alors en compte la quantité de terre à neutraliser, et donc la profondeur du sol. Quant aux périodes d'apport, Hubert Roebroeck, de la société Agro-Systèmes (Indre-et-Loire), précise que ' les produits cuits seront préférentiellement apportés en sortie d'hiver tandis que les produits crus le seront à l'automne ou en début d'hiver '. (1) La notion de complexe argilo-humique ou complexe adsorbant est essentielle pour comprendre la vie d'un sol. Ce complexe est constitué d'argile, de matière organique et d'éléments portant des charges positives : les cations (calcium et magnésium notamment). Le CAH joue le rôle de réservoir et contribue à la stabilité du sol. Sa taille est mesurée par la capacité d'échange cationique (CEC).

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :