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Une technique remise au goût du jour par les vignerons

La vigne - n°102 - septembre 1999 - page 0

On doit la redécouverte de l'élevage sur lies à la constance de certains domaines. Ils ont poursuivi cette pratique traditionnelle à une époque où les oenologues pressaient leurs clients de clarifier leurs vins au plus vite.

Au contraire du débourbage ou du contrôle des températures, l'élevage sur lies ne doit pas grand-chose aux oenologues. On pourrait même dire qu'il a survécu à leurs recommandations. Il fut un temps, pas si lointain, où ils pressaient les vignerons de clarifier au plus vite leurs vins. Certes, leurs conseils n'étaient pas sans fondement. Les caves étaient moins propres qu'aujourd'hui. Il fallait en priorité éviter les déviations dues aux bactéries ou à la réduction. Heureusement, des domaines ont perpétué la tradition. Il faut saluer les Bourguignons qui n'ont jamais cessé d'entonner des rouges troubles. Ils ont maintenu leur façon de faire car ils étaient convaincus de son intérêt malgré les risques qu'elle leur faisait courir. Elle rendait leurs vins plus gras et elle améliorait leur tenue au vieillissement, en préservant notamment la fraîcheur des parfums. Elle aboutissait à un boisé plus fondu et à une complexité aromatique supérieure. Elle renforçait la stabilité tartrique et protéique de leurs chardonnays. Leur entêtement a fait école. Dans le Sud-Ouest, des vignerons se sont eux aussi lancés dans l'élevage des rouges sur lies après avoir remis celui des blancs à l'honneur. Ils n'ont pas été encouragés par leurs oenologues. Au départ, leurs conseillers les prévenaient des risques encourus plutôt que des bénéfices pouvant être engrangés. Progressivement, ils revoient leur jugement. Des travaux scientifiques ont confirmé et éclairci les observations. Les premiers eurent lieu à la faculté des sciences de Dijon.Puis d'autres résultats sont venus de la faculté de Bordeaux. L'Inra de Montpellier s'intéresse également au sujet. Il est à la mode dans les laboratoires, comme dans les chais et dans la presse. On ne peut que s'en féliciter. Les recherches ont clarifié les règles à suivre pour éviter que les blancs réduisent, ce qui fut pendant longtemps le principal obstacle à leur maintien sur les lies en cuves. Elles ont permis d'évaluer l'impact d'une technique nouvelle : le microbullage d'oxygène qui, en l'état actuel des connaissances, paraît indispensable à l'élevage sur lies des cépages riches en polyphénols que sont les tannats, les cabernets sauvignons ou les merlots. Mais les chercheurs n'ont pas encore résolu toutes les difficultés. Il reste à comprendre pourquoi certains rouges perdent leur couleur alors que d'autres, apparemment comparables, la conservent. Plus fondamentalement, on ne sait toujours pas ce que signifie l'enrobage des tanins. Ces questions pourraient trouver des réponses prochainement. En attendant, à mesure que l'élevage sur lies se développe, on s'aperçoit que sa réussite n'est pas seulement une affaire de maîtrise technique. Contrairement au débourbage ou à la fermentation, sa conduite ne se résume pas à des consigne simples de durée ou de température. Il faut des qualités impalpables : la sensibilité et un palais fin. La durée de l'élevage, la sélection des lies, la fréquence des bâtonnages ne peuvent être fixées comme les ingrédients d'une recette. Un vigneron ne peut se fier qu'à de fréquentes dégustations pour en décider. C'est toute la difficulté de l'élevage sur lies.

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