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Un plan de relance pour l'armagnac

La vigne - n°95 - janvier 1999 - page 0

La viticulture gascogne, essentiellement localisée dans le Gers, marche toujours sur trois pieds : les vins tranquilles avec, en particulier, les vins de pays, dont 451 000 hl ont été vendus la campagne dernière, l'armagnac pour lequel un plan triennal de relance ambitieux (1999-2001) est presque ficelé, et le floc.

L'actualité 1998 a été dense dans le Gers au cours de l'année écoulée, surtout sur le front de l'armagnac. Après un audit général de la filière, mené en 1997, les propositions de réforme ont été échafaudées en 1998 et adoptées à l'unanimité, lors d'une assemblée générale extraordinaire de l'interprofession (BNIA), en novembre dernier. Certains n'hésitent pas à parler de plan révolutionnaire. 15 000 hl d'alcool pur ont été distillés sur la vendange 1997 et l'on devrait obtenir un chiffre équivalent pour celle de 1998 (la campagne de distillation se termine le 31 janvier prochain). Une quantité qui continue de s'effriter depuis plusieurs campagnes pour ne représenter maintenant que 15 à 20 % des 1,6 million d'hectolitres produits dans le département.En fait, l'eau-de-vie d'Armagnac est en sérieuse perte de vitesse : une image parfois poussiéreuse, un émiettement des intervenants (quarante maisons de négoce), une perte d'intérêt pour les digestifs en général et, maintenant, la crise en Asie, principal débouché à l'export. ' Il est temps de réagir, c'est le plan du renouveau, indiquent les responsables locaux. Il se vend aujourd'hui deux fois moins d'armagnac qu'il y a quinze ans! 'Un plan triennal est en route pour les années 1999-2001, financé par les pouvoirs publics et les collectivités locales : 30 millions de francs (MF) au total (à titre de comparaison, le budget actuel de l'interprofession est de moins de 10 millions). Son but : sauver la filière de l'eau-de-vie dans le Gers, même si de nombreux vignerons se sont diversifiés depuis des années.Dans le détail, le plan se compose de cinq points. Premièrement, la simplification du produit. ' Entre XO, VSOP, 3 étoiles, Napoléon, les millésimes... il y a plus de vingt dénominations. Plus personne n'y comprend rien, ni les consommateurs, ni les acheteurs ', explique-t-on. Une classification plus simple est proposée avec deux catégories : eau-de-vie jeune de moins de cinq ans et celle de plus de cinq ans. Avec, dans le premier cas, l'option d'une eau-de-vie blanche (le dossier sera présenté à l'Inao pour obtenir une nouvelle appellation) et, dans le deuxième cas, l'option des millésimes. Ce qui donne en fait quatre options.Evidemment, du côté du négoce, qui met en marché neuf bouteilles sur dix, certains grincent des dents car c'est une véritable révolution commerciale. Une période probatoire, dont la durée n'est pas encore fixée, est prévue. Derrière cette classification revue, l'armagnac affirmerait aussi son identité par rapport à l'autre grande eau-de-vie de l'Hexagone, le cognac, dont il se sent souvent dans l'ombre.Deuxième point : la structuration de la filière au sein de clubs d'entreprises par pays ou par activité. Une dizaine sont créés ou en gestation : pour la Chine, le Japon, la Grande-Bretagne, mais aussi sur le thème de la grande distribution, d'Internet ou des produits nouveaux (cocktail...). Ces clubs, véritable originalité en France, regroupent à chaque fois, au sein d'une structure juridique (GIE...), les principales entreprises intéressées par le thème. Ils sont une façon de compenser l'atomisation du négoce gersois et de faire jouer les synergies, tout en recevant des aides.Troisièmement point : les actions sur le produit. Tout d'abord, une politique de la régulation de la distillation : trop longtemps, on a distillé en armagnac plus que les besoins du marché... pour arriver à onze ans de stocks en 1998! La période de distillation se clôturera au 31 décembre et non plus au 31 mars; ensuite, l'Inao procédera à un inventaire parcellaire qui gèlera, dans ce vignoble mixte, les surfaces à finalité d'armagnac. Sur le front de la recherche, trois études sont lancées sur les relations entre l'armagnac et la santé. Du côté de la promotion, toute une stratégie, plus offensive, est mise en place : relations publiques, actions avec les écoles hôtelières, les sommeliers...Quatrième point : la mise en valeur du pays d'Armagnac. ' Il est mal identifié. Nous devons travailler l'accueil, le partenariat avec les structures touristiques, l'aménagement des sites. Un travail immense ', reconnaît Max Dupuy, le directeur de l'interprofession, une structure dont les moyens seront revus à la hausse avec la création notamment d'emplois jeunes. Dernier volet de ce plan d'envergure : des actions sur les stocks. Pour les armagnacs entre cinq et dix ans, le sur-stock est alarmant. Un travail est mené pour impliquer les banques dans un dispositif de financement.Lors de la campagne écoulée, 451 000 hl ont été commercialisés en vins de pays des côtes de Gascogne, soit + 5 % par rapport à la campagne précédente. Mais les prix restent assez peu rémunérateurs : 380 F/hl en moyenne pour les blancs (90 % de la production) et 384 F/hl pour les rouges. ' Cela couvre à peine les frais, estime un vigneron. Il faudrait au moins 4 F/l pour commencer à s'en sortir. C'est trop juste pour oser anticiper dans les investissements. Nous sommes dans une période fragile. Du coup, on prend peut-être du retard au niveau technique. ' Les gelées dans le Languedoc vont peut-être entraîner un regain d'intérêt pour les blancs du Gers de la part des opérateurs nationaux, voire internationaux.Au niveau des structures, un permanent a été embauché pour animer le syndicat des vins de pays. ' En 1998, nous avons eu un débat interne concernant notre potentiel de développement en rouges et sur l'opportunité de jouer davantage la carte des vins de cépages en blancs alors qu'aujourd'hui, nous n'avons pratiquement que des produits d'assemblages. A terme, on pourrait produire 1 Mhl de vins de pays dans ce département ', explique-t-il. Une plaquette de présentation a été aussi éditée et 24 panneaux publicitaires relookés (4 × 3), installés sur les bords des routes du département.1,2 million de bouteilles de floc de Gascogne (produit muté : moût/armagnac) ont été vendus lors de l'année civile 1998, soit + 18 % sur 1997, avec une proportion de 60 % de rosés et de 40 % de blancs. Peu à peu, on voit le bout du tunnel, même si la situation est encore fragile. ' En 1998, nous avons défini une politique de communication claire : positionner le produit sur l'authenticité et toucher prioritairement la clientèle féminine. Un travail est mené sur les associations gastronomiques ', indique Emmanuelle Rouzet-Roussigne, responsable du marketing et du développement à l'interprofession, basée à Eauze (Gers), et dont le budget est de 3 MF. Après huit mois de négociations, le floc est maintenant référencé auprès du monopole de l'Ontario (Canada). Une campagne d'affichage (pour la première fois en hiver) a été lancée en décembre et ce, jusqu'en mars dans plusieurs métropoles du Sud-Ouest. ' Nous souhaitons atteindre 2 millions de bouteilles vendus dans trois ans ', indique-t-on.

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