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Les levures sont source d'arômes

La vigne - n°91 - septembre 1998 - page 0

Outre l'alcool, les levures produisent une quantité de composés dont des composés d'arômes, responsables du caractère vineux. Certains apportent des notes agréables, fleuries et fruitées. D'autres ne devront pas dépasser des doses limites pour ne pas les déprécier.

Les composés volatils produits lors de la fermentation sont issus du métabolisme principal des levures ou de métabolismes secondaires, impliquant certains composés variétaux et préfermentaires. Nous nous limitons ici à présenter les premiers, produits secondaires de la fermentation alcoolique. Ils représentent quantitativement la majeure partie des constituants de l'arôme du vin. Ils ont donc été les premiers étudiés. Ils appartiennent aux familles chimiques des alcools, des acides gras et de leurs esters, des composés soufrés et carbonylés, et des lactones.Les principaux alcools supérieurs formés par la levure (concentrations généralement supérieures à 50 mg/l) sont les 2 et 3-méthylbutanol, le 2-phényléthanol et le 2-méthylpropanol. Ce sont les seuls dont la concentration est suffisante pour qu'ils soient perceptibles à la dégustation. Plusieurs autres alcools sont formés à des teneurs beaucoup plus faibles. Mis à part le 2-phényléthanol au parfum de rose, les alcools supérieurs ont des odeurs généralement jugées indésirables.Les acides gras produits par la levure ont des odeurs jugées généralement désagréables alors que leurs esters présentent des notes florales ou fruitées, à l'exception de l'acétate d'éthyle, mal perçu pour des teneurs supérieures à 100 mg/l et responsable de l'odeur de piqué à de fortes teneurs. Les teneurs en acides gras sont en général inférieures à leur seuil de détection olfactive, contrairement à celles de leurs esters. Cependant, du fait de l'hydrolyse de ces esters au cours de la conservation, leur influence s'exercera principalement sur les vins jeunes. Cela est particulièrement vrai pour les primeurs auxquels l'acétate d'isoamyle confère, en synergie avec ses analogues, les acétates d'isobutyle et de 2 méthylbutyl, l'odeur de banane bien caractéristique.Bien que la levure forme plusieurs classes d'acides organiques et d'esters, les seuls ayant un impact sur l'arôme sont l'acide acétique et ses homologues à nombre pair d'atomes de carbone (jusqu'à 10 atomes de carbone), l'acide propanoïque, les acides 2 et 3 méthylbutanoïques, les esters éthyliques de ces acides et les acétates des principaux alcools supérieurs du stade fermentaire. L'acide acétique et l'acétate d'éthyle sont de loin les plus importants en quantité. Cependant, malgré leur réputation négative, ils seraient nécessaires à l'arôme du vin pour des teneurs optimales variables, mais avec des valeurs limites voisines de 600 mg/l pour le premier et 100 mg/l pour le second.Les composés soufrés sont subdivisés en deux groupes : ceux dont le point d'ébullition est proche ou inférieur à celui de l'eau et les autres. Les premiers sont dits légers, les seconds lourds. Les premiers présentent des odeurs désagréables, voire nauséabondes. Cependant, un impact positif de certains d'entre eux n'est pas à exclure, comme cela a été signalé pour le sulfure de diméthyle dans le cas de vins vieux. Il en est de même avec les composés soufrés lourds. Au-delà de leur seuil de perception, ils sont responsables d'odeurs désagréables rappelant le chou. En deçà, ils contribueraient aux notes florales et fruitées.En raison de la forte activité réductrice de la levure qui les transforme en alcools, les composés carbonylés se trouvent généralement dans les vins jeunes en faible concentration. De plus, ils se combinent au SO2 et forment des acétals avec l'éthanol, ce qui contribue à diminuer leur teneur à l'état libre. Ainsi, même l'acétaldéhyde, l'acétoïne et le diacétyle qui sont les plus abondants, n'atteignent-ils pas en général leur seuil de détection en fin de fermentation. L'acétaldéhyde est responsable d'arômes oxydés ou éventés. L'acétoïne et le dicacétyle donnent des notes beurrées et lactées. Leurs teneurs devront donc être contrôlées, notamment en évitant des soutirages trop précoces. Par contre, l'acétal éthylique de l'acétaldéhyde participerait positivement à l'arôme par son odeur fruitée et verte.Au cours de la fermentation alcoolique, la levure produit de nombreuses lactones dont la plupart ne dépassent pas leur seuil de perception. Seule la gamma nonalactone, à l'odeur de noix de coco, pourrait participer à l'arôme du vin. Signalons toutefois que le sotolon, gamma lactone formée par les levures à voile, est l'une des molécules clés de l'arôme des vins jaunes du Jura.Il ressort de nombreux travaux que les diverses souches de levures produisent les mêmes composés volatils. En revanche, quantitativement, de nombreuses différences sont mentionnées, notamment en ce qui concerne la balance entre les diverses classes.Ces différences quantitatives se traduisent par des différences olfactives ayant conduit à distinguer des souches dites aromatiques de souches dites neutres. En fait, de récents travaux montrent que ces distinctions ne sont pas absolues. Certaines conditions de vinification peuvent les gommer, de même d'ailleurs que le vieillissement. Seules les souches de l'espèce S. cerevisiae var. Uvarum se différencieraient de façon constante par la production de quantités importantes de 2-phényléthanol qui rappelle la rose et de son acétate.Des travaux montrent que les facteurs les plus influents sur la production en composés volatils sont la température, l'oxygénation, les nutriments azotés et la turbidité du milieu de fermentation. La production des alcools supérieurs serait ainsi favorisée par une température élevée (environ 26°C), une faible teneur en azote ammoniacal, l'aération du moût et une turbidité élevée. Inversement des conditions anaérobies strictes, une clarification du moût avec bourbes résiduelles (pour éviter des arrêts de fermentation) et une température basse (15°C environ) favorisent la formation des acides gras à nombre pair d'atomes de carbone homologues de l'acide acétique et de leurs esters. L'aération du moût serait favorable à la formation des acides propionique, isobutanoïque, isopentanoïque et de leurs esters. Pour les acétates d'alcools supérieurs, les conditions anaérobies semblent les plus favorables à leur formation. Quant à l'excès d'hydrogène sulfuré, il serait surtout dû à une carence azotée du moût. Cependant, une turbidité du moût élevée est aussi favorable à l'apparition des composés soufrés légers et donc défavorable à la qualité des blancs.

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