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La fermentation malolactique sous marc

La vigne - n°91 - septembre 1998 - page 0

Les longues macérations et les vendanges très mûres prédisposent à une fermentation malolactique sous marc. Elle reste redoutée par crainte de piqûre lactique. Pourtant, avec un bon suivi, les complications sont rares.

La fermentation malolactique sous marc effraie toujours certains vignerons, par crainte de piqûre lactique. Cette fermentation est rarement recherchée mais le vigneron s'y expose quand il fait le choix d'une longue macération. L'enjeu consiste alors à aller le plus loin possible dans l'extraction sans prendre trop de risques. De même, une vendange très mûre favorise ce phénomène.L'année 1997 a d'ailleurs compté de nombreux départs, souvent très rapides, de fermentation malolactique sous marc. Certains vignerons stoppent alors la fermentation par adjonction de SO2, pour ensuite procéder au soutirage. La fermentation malolactique reprendra ensuite dans la cuve de stockage. Mais de plus en plus, les vignerons laissent la malo s'effectuer sous marc, avec une vigilance accrue.La perception et l'approche de la malo sous marc varient selon les régions. Elle est encore parfois considérée comme un échec dû à un manque d'hygiène. C'est parfois vrai mais la majorité des malo sous marc se déroulent dans des chais propres. Ce sont d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte dans son déclenchement (acidité des raisins, température, durée de macération...). Dans les côtes du Rhône, de nombreux vignerons affichent une réelle réticence. En Languedoc-Roussillon, ce phénomène est plus entré dans les moeurs du fait de sa fréquence. L'an dernier, un oenologue estimait entre 20 et 25 % la proportion des cuves ayant effectué leur malo sous marc. A Bordeaux, certains terroirs y sont plus exposés que d'autres mais, là aussi, elle semble intégrée dans les schémas possibles.Si la gestion de la fermentation malolactique sous marc est appréhendée de plus en plus sereinement, c'est grâce à la multiplication des expériences. ' Il faut y aller doucement, confie un oenologue du cabinet Déjean, à Narbonne, car on joue un peu avec le feu dans ce milieu instable. Puis, au fil des observations, on s'aperçoit que c'est tout à fait réalisable. 'Même lorsque les deux fermentations se juxtaposent, elles peuvent s'achever sans altération du vin. ' Il est très fréquent que la fermentation malolactique vienne se greffer aux trois quarts de la fermentation alcoolique ', indique Francine Calmels, du laboratoire départemental de Gaillac. Le risque le plus important est la piqûre lactique : les sucres - qui restent dans les baies - sont transformés en acides lactique et acétique par les bactéries lactiques, provoquant une augmentation de l'acidité volatile. Le vin présente alors un goût piqué. Cet incident reste rare car il existe un moyen de surveiller l'évolution du moût : le suivi de l'acidité volatile toutes les 48 h, voire toutes les 24 h, complété par une dégustation des moûts. Si le taux de volatils dévie, un décuvage s'impose. Les oenologues estiment que ce taux devient critique quand il dépasse les 0,5 à 0,6 g de H 2SO4/l, selon les caractéristiques de la vendange (tanin, degré...).' Pour une vendange semblable, certains vignerons sont affolés dès que le taux dépasse 0,4 g, témoigne un oenologue, alors que leur voisin commencera à s'inquiéter à 0,6 g. La gestion du risque s'étalonne sur une large échelle. Je constate toutefois une surveillance accrue de la qualité des vinifications, donc également du bon déroulement de la malo, car les vignerons vendent de plus en plus leurs vins en bouteilles. Ils prennent ainsi conscience de l'exigence croissante des acheteurs et consommateurs. 'Pour mener une fermentation malolactique sous marc, il existe plusieurs approches selon l'équipement ou la coutume régionale. La première consiste à noyer le chapeau de marc pour éviter que les bactéries s'y développent au contact de l'air. Si l'on privilégie l'option du chapeau noyé, il suffit d'ajouter du vin sur ce chapeau de façon à remplir complètement la cuve. Cette opération n'est pas réalisable à l'encuvage car la fermentation malolactique, avec les dégagements qu'elle engendre, est source de débordements. La malo, de son côté, génère un faible dégagement de gaz. Le débordement de vin est réduit. On peut le recueillir au moyen des cannes de remontage.' En ouvrant la vanne du bas, on récupère le surplus, soit environ 100 l pour une cuve de 100 hl, précise Jérome Asco, maître de chai au château Haut-Gléon (Aude), qui a élaboré la totalité de son millésime 1997 de cette façon. Quand le chapeau de marc est noyé, je n'effectue plus de remontage. Par ailleurs, il m'arrive d'ajouter 1 à 2 g/hl de SO2 quand la malo s'enclenche trop vite. Cela nous laisse alors le temps nécessaire pour noyer le chapeau. Ensuite, nous surveillons le taux de volatils au jour le jour. Puis, quand la malo est terminée, nous sulfitons (3 à 5 g/hl) et la macération se poursuit pour atteindre une durée globale de plus de trente jours. 'L'autre solution consiste à insérer du CO2 dans la cuve, de façon à éviter tout contact avec l'air. Cette tendance prédomine dans le Bordelais. Ces deux options peuvent d'ailleurs être couplées, en veillant à ce que le chapeau reste humide tout en étant protégé par du CO2. Quant au traitement de la vendange avant l'encuvage, il reste classique. Les oenologues insistent toutefois sur l'importance d'une belle qualité des raisins : ' la vendange doit être saine. Il est par ailleurs conseillé de bien fouler les baies au préalable '.

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